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« Jadot, Roussel, Hidalgo, c’est de votre faute ! » : à gauche, les « traîtres » à Mélenchon sur le billot

Défaits par Marine Le Pen d’environ 400 000 voix au premier tour, les électeurs de la France Insoumise sont rapidement passés des larmes à la colère. Depuis dimanche soir, la génération Mélenchon demande des têtes. Et souhaite régler une fois pour toute ses comptes avec le reste de la gauche.

Image d'illustration

« Cent mille têtes ! », réclamait le révolutionnaire Jean-Paul Marat, en 1792 dans son journal l’Ami du Peuple. Deux siècles plus tard, la Terreur est aussi à l’ordre du jour chez les insoumis. Mais eux, magnanimes, ne veulent que trois têtes sur le billot. Celles des félons Yannick Jadot (EELV), Fabien Roussel (PCF) et Anne Hidalgo (PS). Venus nombreux aux Cirque d’Hiver pour la soirée électorale de Jean-Luc Mélenchon, les militants ont attendu tard dans la soirée, croyant jusqu’au bout en leurs maigres chances d’arriver au second tour. Tout cela en vain. Comme l’a confirmé le score honorable, quoiqu’insuffisant, de leur candidat : 22% des voix. Encore raté ! Ne manquaient toutefois qu’environ 400 000 suffrages pour dépasser Marine Le Pen. De quoi susciter une frustration bien compréhensible parmi les électeurs, qui dans leur désespoir ont tourné un regard accusateur vers les candidats de gauche n’ayant pas rejoint l’Union Populaire (UP). Avec leur appui, Mélenchon serait probablement passé… L’heure des comptes a sonné.

Le renégat Roussel

Le premier “social-traitre” sur la liste du tribunal révolutionnaire : Fabien Roussel, le champion du Parti Communiste Français. « Mélenchon président ! Roussel à la poubelle », scandait-on déjà dimanche soir, après la défaite. Un slogan vengeur lancé au hasard d’une déconvenue, pensait-on. Pour une fois rassemblée autour d’un leader, la gauche s’est sans doute laissée aller un temps à ses plus bas élans ? Non, rien de tout ça. Depuis le début de la semaine, la haine farouche que vouent les soutiens de Jean-Luc Mélenchon au viandard préféré des médias n’en finit pas de tapisser les réseaux sociaux. « Fabien Roussel le traître ! », éructe une internaute sur Twitter. « Jadot, Roussel, Hidalgo, c’est de votre faute, bande de traitre », tonne un autre, mettant le candidat du PCF dans le même sac que les « réformistes ». Et des centaines de tweetos reprennent le refrain en chœur, tandis que des milliers partagent ou aiment leurs publications.

Une colère de la base bien vite remontée aux oreilles des cadres de la France Insoumise, qui n’ont pas hésité à jeter de l’huile sur le feu. Adrien Quatennens, député LFI du Nord, tire le premier : « Je respecte les communistes, mais Fabien Roussel n’a pas tenu parole, se désole-t-il lundi midi, sur FranceInfo. Il m’avait dit que si un candidat de gauche était en mesure d’être au second tour, il était prêt à repenser sa candidature. » C’est ensuite au tour de Manuel Bompard, coordinateur du mouvement, de donner le coup de grâce : « Roussel ne peut pas s’exonérer de toute responsabilité », grommèle-t-il deux jours plus tard, sur la même chaîne. Difficile de leur donner tort : si la direction du parti avait appelé à l’union, les très disciplinés militants communistes auraient pour la plupart rejoint l’UP. Quoiqu’en dise Fabien Roussel, qui ne trompe personne en affirmant que ses électeurs « n’auraient pas voté pour un autre candidat ».

Tout pour LFI, des miettes pour les autres.

A la gauche de la gauche, le rendez-vous manqué de 2022 a ouvert une plaie qui ne se refermera pas de sitôt. Au moins parmi les électeurs. Car du côté des cadres, on semble déjà plus disposé à faire des alliances pour les législatives : « Voyons-nous rapidement, avant même le deuxième tour, pour faire gagner la gauche aux législatives », a proposé le candidat du PCF, le 14 avril lors d’une conférence de presse. Une main tendue tout à fait surprenante, à qui se souvient de l’oukase de Manuel Bompard adressée la veille à la gauche : « On est favorable à faire en sorte qu’il puisse y avoir éventuellement un regroupement », clamait-il, avec l’arrogance du vainqueur. A condition qu’il se fasse « autour du programme qui a été porté par Jean-Luc Mélenchon à l’élection présidentielle et autour des résultats tels qu’ils ont été choisis par les électeurs au premier tour ».

Autrement dit : tout pour LFI, des miettes pour les communistes. Une véritable humiliation pour les communistes. Mais ont-ils vraiment d’autre choix ? On ne peut pas refuser de s’allier à Mélenchon au premier tour, pour ensuite appeler à voter Emmanuel Macron et finir dans les bras des Verts et du Parti Socialiste… Il y a des limites.

Des Verts et des pas mûrs

Des limites qu’Europe Ecologie Les Verts n’a jamais hésité à franchir. Notamment depuis l’élection de Yannick Jadot, consacrant le virage social-démocrate du parti. Attaques répétées à l’endroit de la France Insoumise, rapprochements avec le PS, européisme assumé… Mais le résultat du premier tour a changé la donne et tout porte à croire que la vieille alliance avec les roses ne sera pas renouvelée. Il faut désormais s’en remettre au mouvement majoritaire à gauche, ainsi qu’aux demandes de plus en plus exigeantes de Manuel Bompard, qui n’a rien oublié des saillies de Jadot à l’endroit de son ancien candidat.

« Nos relations ont été lourdement dégradées pendant cette campagne, écrit ce dernier dans une lettre aux Verts, abordant la possible construction d’une majorité politique pour les législatives. Sans vous répondre jamais, nous avons pris au sérieux vos accusations souvent blessantes et vos appréciations selon lesquelles existeraient entre nous des difficultés insurmontables. Vous les avez assez répétées pour que nos électeurs respectifs s’en souviennent. » Ambiance. Et les mises en gardes ne font que commencer. Toujours dans la même missive, co-signée par Mathilde Panot, Aurélie Trouvé et Adrien Quatennens, les insoumis n’hésitent pas à taper là où ça fait mal : « Nous nous souvenons que vous nous avez exclus de toute liste commune y compris face au Rassemblement national en région PACA, peut-on lire encore. Dès lors, un arrangement de dernière minute pour de simples soucis de sauvetage électoral d’organisations serait incompris (…) pour le grand nombre que la politique politicienne exaspère et désespère. » Et toc !

Nul n’a été vraiment surpris du triomphe de Jean-Luc Mélenchon à EELV.

Là encore, il est aisé de lire entre les lignes : tout pour LFI, des graines pour les Verts. Attention, toutefois, à ne pas pêcher par arrogance et s’aliéner un électorat stratégique. Le score de Yannick Jadot (4,8%) au premier tour est loin d’être ridicule. De plus, sa base n’est pas assez démoralisée pour faire d’EELV un « parti satellite » des insoumis, nous confie un élu local de la mouvance. A vrai dire, nul membre du parti n’a été vraiment « surpris » du triomphe de Jean-Luc Mélenchon, tant s’est imposée l’idée du “vote efficace” parmi les jeunes au cours des derniers jours précédant le scrutin.

« Il ne faut pas tomber l’écueil qui consiste à dire que Jean-Luc Mélenchon est l’unique pôle à gauche », assure notre élu, persuadé que LFI ne pèse pas vraiment 22,8%. Quoique conscients de la popularité réelle de l’Insoumis en chef, les écolos essaient de se rassurer en répétant que son score est avant tout le fruit des circonstances particulières de cette élection. Mais n’est-ce pas le cas lors de chaque scrutin ?

Des roses blanches pour les socialistes

« En politique, il n’y a pas de convictions, disait Talleyrand. Il n’y a que des circonstances. » Et parfois les circonstances ne sont pas favorables, le Parti Socialiste en sait quelque chose. Après avoir fait le score piteux de 6,36% en 2017, le parti d’Anne Hidalgo n’a récolté que 1,7% des voix au premier tour cette année. « Le PS se retrouve dans une situation de mort cérébrale », concède Jean-Christophe Cambadélis, à Valeurs actuelles.

Implanté localement mais sans projet d’envergure nationale, la social-démocratie française devrait accepter son « auto-dissolution » pour accélérer sa « refondation », tranche le ténor. Une stratégie plus efficace que celle d’appeler à « l’union » pour les législatives, au soir d’une défaite causée par l’éclatement de la gauche, dont les socialistes sont partiellement responsables. D’autant que les insoumis n’ont pas publiquement exprimé un ardent désir d’alliance avec le PS. Loin de là. Le souvenir douloureux du quinquennat Hollande, sans doute.

Quoi qu’il en soit, des discussions ont effectivement lieu à gauche pour présenter un front uni au mois de juin. Il faut toutefois se rendre à l’évidence : la part du gâteau laissée au PS par LFI sera particulièrement menue. Une triste fin pour le parti de François Mitterrand. Mais l’alternative qui se pose à gauche est bien la suivante : la France Insoumise… ou la mort.

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