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Marseille : « Le docteur Guedj m'a percé les dents à vif, sans m'endormir », témoigne une victime du dentiste accusé de mutilations dentaires

INTERVIEW A la veille du procès du Dr Lionel Guedj, un ancien patient du dentiste millionnaire marseillais accusé de mutilations dentaires témoigne de son calvaire

Image d'illustration

L’ESSENTIEL

  1. Ce lundi s’ouvre devant le tribunal correctionnel de Marseille le procès du docteur Lionel Guedj et de son père, tous deux accusés de violences volontaires ayant entraîné une mutilation ou infirmité permanente, mais également escroquerie et faux et usage de faux.
  2. Les dentistes sont soupçonnés d’avoir inventé des pathologies auprès d’une patientèle souvent sans moyens financiers, qu’ils ont traitée à la chaîne au mépris des précautions que nécessitent de tels actes.
  3. Sur les bancs des parties civiles, plus de 400 anciens patients, dont Noël Kouici, qui raconte son calvaire.

Il est l’une des 322 victimes du docteur Lionel Guedj à s’être constituées partie civile ce lundi, dans l’un des procès les plus attendus de l’année. Voilà des années que Noël Kouici vit sans dent, ou presque, et avec des douleurs insoutenables. Le quinquagénaire a été patient de ce chirurgien dentiste des quartiers nord​ de Marseille, accusé d’avoir inventé des pathologies auprès d’une patientèle souvent sans moyens financiers, traitée à la chaîne au mépris des précautions que nécessitent de tels actes. A la veille de l’ouverture du procès titanesque du dentiste, et de son père, salarié de son cabinet dentaire, devant le tribunal correctionnel de Marseille, Noël Kouici se confie à 20 Minutes sur son quotidien, ses attentes et ses difficultés.

Comment avez-vous croisé la route du docteur Lionel Guedj ?

J’habitais à Consolat [dans les quartiers Nord de Marseille]. Mon dentiste habituel était très efficace mais très long. Il y avait deux heures de décalage entre l’horaire du rendez-vous et le rendez-vous. Et la situation devenait tellement grave. J’avais certaines dents qui se déchaussaient. J’avais un appareil provisoire sur le bas, pour les deux dents de devant. J’avais quelques caries. Je viens d’une grande famille avec des petits moyens. Je pense que même le dentifrice, c’était du luxe. Donc les dents, malheureusement, ça a démarré quand j’étais jeune.

Des collègues de mon quartier m’ont recommandé le docteur Guedj. Tu avais des rendez-vous tout de suite à des heures incroyables. Il me prenait très tôt à 7 heures du matin. En une demi-heure, j’étais sorti. Et je n’étais pas le premier ! Je pense qu’il commençait à 7 heures du matin, jusqu’à finir le soir tard.

Comment s’est passé le premier rendez-vous ?

Il m’a promis le rêve, à un prix défiant toute concurrence. Il m’a dit : « Je te remets des dents toutes blanches, avec le sourire éclatant. Pour l’argent, ne t’en préoccupe pas. » Et après, on a entamé les travaux.

Les travaux ?

Bah ouais. Parce que ça a été des travaux. Il m’a tout charcuté. Au début, ça allait. Il y a eu juste un moment où ça a été problématique : c’est quand il m’a percé directement les dents de devant sans m’endormir. Il a envoyé le produit pour tuer le nerf directement sur les dents. C’était un vendredi, en 2009. Je m’en souviendrai toujours. Je me suis retrouvé le week-end à aller à la féria de Nîmes, où je pouvais même plus mordre un beignet. Je ne pouvais plus ouvrir la bouche. Je suis retourné au cabinet le lundi en catastrophe, parce que la douleur était abominable.

Après, on est pris dans l’engrenage. Il y a eu la suite, quand arrive le moment où il m’a taillé les dents. Là, j’ai compris que c’était la fin, qu’il m’avait tué toutes les dents, même celles que j’avais encore saines. C’est allé très très vite. En un mois, c’était réglé. J’y allais pratiquement deux ou trois fois par semaine. Il y a des jours où il m’a massacré, et quand je partais de là-bas, ce n’était pas la peine. Je rentrais directement chez moi.

Et après ?

Au début, c’était correct. J’avais mes dents. Ça a commencé par quelques petits morceaux d’émail qui ont cassé. Et après, ça a été la folie. Un an et demi après, j’ai eu des abcès qui sortaient dans les gencives, à ne rien comprendre. On m’avait dit pourtant que je n’aurai plus jamais de douleurs aux dents. Et ça a coïncidé avec la révélation de l’affaire dans le journal. Et derrière, c’était fini. Chaque fois que je voyais un dentiste, je disais que j’étais un ancien patient du docteur Guedj, et on me répondait : « Je ne touche pas. Je suis désolé mais l’histoire est trop grave. Je ne peux pas me permettre. » Alors, à force que les dentistes ne voulaient plus me recevoir, vous savez, les abcès, je me les perçais moi-même.

Y a-t-il des répercussions aujourd’hui, dix ans après, dans votre quotidien ?

C’est énormément de souffrances. J’en subis encore les conséquences. Je peux vous en faire la démonstration. Regardez. (Il ouvre sa bouche et effleure sa canine gauche. Cinq dents bougent, sur le point de tomber.) Et là. (Il écarte sa joue et laisse entrevoir des gencives dénuées de molaires, en haut et en bas.) Voilà.

C’est horrible, je vous le dis franchement. Mais vous vivez avec ça. Même du pain c’est compliqué, parce que je n’arrive pas à mâcher. Je mâche avec mes gencives. Mais mes gencives, elles ne mâchent pas assez. Ça ne coupe pas assez. Une viande, je ne peux pas la mâcher. Je la gobe. Je suis obligé. Tout ce qui est épais, ça me coupe à l’intérieur, les peaux des joues. Et quand je vous parle, je ne vous explique pas la douleur que je ressens.

Même en parlant, je sais que ça vibre. Regardez (il montre ses deux canines, en dents du bonheur). Il y a un trou. Et avant, ça n’y était pas. Il y a eu un décalage. Elles étaient aussi serrées que les vôtres. Mais au fil du temps, ça s’est passé comme ça. J’ai perdu les dents du fond qui servaient d’assises. Et ça a été fini. Tout s’est décalé.

J’avais des douleurs au dos. Je prends rendez-vous chez l’ostéopathe pour qu’il me manipule, car ce n’était plus possible. Il me dit de me mettre droit. Je n’ai pas ouvert la bouche. Et il me dit : « Il vous manque des dents là et là. » Tout venait des dents, même mes douleurs aux yeux et mes migraines. Et ça fait des années que c’est comme ça.

Quelles solutions s’offrent à vous ?

J’ai justement un rendez-vous à l’hôpital de la Conception. Je dois tout faire arracher, parce que c’est foutu. La solution la plus simple après, c’est le dentier. A mon âge : j’ai 52 ans. Donc 52 ans, plus de dents. Ça, je le vis mal. Avec ce qu’il m’a fait, l’os est complètement détérioré au niveau des sinus. Donc, je dois faire une greffe osseuse pour pouvoir entrevoir de faire des implants. Les implants, en France, c’est hors de prix pour une bouche entière. Donc, je suis en train de prospecter pour pouvoir le faire en Hongrie. Ça reste encore un pays européen. Ils ont des notes assez correctes. Mais il y en a quand même pour 15.000 euros.

Qu’attendez-vous de ce procès ?

On ne peut pas profiter du système et abuser de la santé des gens qui n’ont pas les moyens. C’est certain que des gens qui auraient eu les moyens, après la démarche et les explications, ils auraient dit : « Au revoir et merci ! »

Je cherche à ce qu’il paie clairement ce qu’il nous a fait, et qu’il puisse au moins participer à ce qu’on retrouve un sourire. Si le jour où je dois témoigner durant le procès, j’ai plus de dents car ça intervient après mon opération à la Conception, eh bien, je viendrais parler sans dent. Je montrerais ça à tout le monde, et je pense qu’ils mesureront qu’à 52 ans, ne plus avoir de dent… Et puis, lui aussi, il pourra voir ce qu’il a fait.


(SOURCE) : 20minutes.fr SOURCE / LIRE L'ARTICLE COMPLET

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