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Débat Eric Zemmour / Michel Onfray : Beaucoup d’accords et peu de désaccords

Ce lundi 4 octobre, Michel Onfray et Éric Zemmour se sont donné la réplique sur la scène du Palais des Congrès de Paris pour un débat exceptionnel. Au cours des deux heures de discussion, les deux intellectuels ont paru plus proches que jamais.

Image d'illustration

Par : Nicolas Le Hors / V.A.

20h30. Voilà déjà trente minutes que Michel Onfray et Eric Zemmour auraient dû commencer à disserter ensemble sur les thèmes savamment préparés par le chef d’orchestre de la soirée, Stéphane Simon. En bas, dans le hall immense du Palais des Congrès, le service de sécurité est débordé par le nombre inhabituellement élevé de spectateurs et doit retarder le début de la joute. Les 3700 personnes que peut accueillir la salle du 17ème arrondissement parisien entrent au compte-goutte. Militants et soutiens d’Eric Zemmour profitent de cette attente pour distribuer à leurs voisins de sièges affiches, stickers, tracts et autocollants à l’effigie du presque-candidat.

Il faut attendre 21 heures pour voir la silhouette de Stéphane Simon surgir des rideaux de velours rouge de la scène et lancer triomphant : « Bonsoir et merci à tous d’être là ! Le directeur des lieux vient de me confier que jamais la salle n’avait été aussi pleine depuis les adieux de monsieur Charles Aznavour ! » Face aux applaudissements et aux « Zemmour président ! », fusant de toute part, Stéphane Simon rappelle vainement qu’« il s’agit d’un débat et non d’un meeting politique ».

Les accords promis étaient bien au rendez-vous ; les désaccords, eux, se sont faits plus discrets

Un débat certes, un affrontement sûrement pas. Le co-créateur de Front Populaire avait clairement annoncé qu’il ne souhaitait pas faire de ces deux heures de discussion un « match de boxe ». Son ambition doit être plus que satisfaite. Peut-être est-ce l’ambiance calfeutrée ou les lumières tamisées, mais la soirée a davantage tourné au flirt idéologique qu’à l’affrontement bestial. Si le Normand avait laissé entendre çà et là qu’il pourrait soutenir une candidature Zemmour, d’aucuns estimaient que la campagne identitariste du candidat putatif creuseraient une fois pour toutes leurs désaccords. Manifestement, ils se sont trompés. Hier, si les accords promis étaient bien au rendez-vous, les désaccords, eux, se sont faits plus discrets. Les thèmes se succèdent — le rapport à l’enfance, le système médiatique, le déclin de la France — et leurs points de convergence se multiplient. Délicieusement iconoclaste, le philosophe le plus médiatisé de l’Hexagone a encore surpris hier par la radicalité de ses propositions. Lancé par Stéphane Simon sur la question du port d’armes, Michel Onfray arbore une mine un peu interdite, avant de reprendre ses esprits. Il dégaine alors son arsenal philosophique, développe sur Hobbes et sa célèbre citation : « Si l’état n’assure plus la sécurité, l’individu peut se la réapproprier lui-même. » Il embraye sur l’inaptitude de l’Etat français à assurer le droit à la sécurité, pourtant au fondement du contrat social et lâche : « Si je trouve le réarmement de toute la population un peu excessif, je suis pour une aristocratisation du port d’armes. Nous avons une gendarmerie formidable. Nous avons une police municipale formidable. Nous avons des militaires formidables. Je suis tout à fait d’avis, d’autoriser ces gens-là à avoir en permanence une arme sur eux, même en civils. » Même Eric Zemmour, souvent peu avare en propositions chocs, se fait sur ce sujet plus timoré que son adversaire chamboisien.

Naguère beaucoup plus nuancé sur le thème de l’immigration, Onfray tombe là aussi d’accord avec l’auteur de La France n’a pas dit son dernier mot (Rubempré). Ce dernier développe les propositions qu’il déclame depuis un peu plus d’un mois partout en France : « Suppression du regroupement familial, abolition de la naturalisation par le mariage, du droit d’asile, du droit du sol, des allocations familiales pour les étrangers. » Non seulement le philosophe ne contredit pas, mais pour le plus grand bonheur du public, il ajoute : « Je souscris effectivement à la nécessité de faire un grand nettoyage, ce n’est pas possible que ça continue comme ça. Les gens vivent dans une insécurité qui n’est pas un horizon de civilisation, on ne doit pas pouvoir craindre quand on est une femme, quand on porte une jupe, ça n’est pas possible, ça n’est pas pensable. » Aurait-il voulu provoquer l’ire des journalistes de Libération chers à son cœur qu’il ne s’y serait pas pris autrement.

Après une heure trente d’échanges, le premier désaccord véritable émerge enfin. En un clin d’œil le ton monte et les paroles se crispent. Sur l’écran géant disposé au-dessus des trois protagonistes, les équipes de Front Populaire diffusent le témoignage d’une jeune femme issue de l’immigration au prénom étranger et qui a fait de la lutte contre l’islamisation le combat de sa vie. Ce témoignage d’une assimilation réussie en dépit du prénom est renvoyé à Eric Zemmour comme un contre-exemple à sa vision très assimilationniste de l’intégration. Le philosophe normand enfonce : « La brutalité des propos tenus par Eric sur les prénoms choquent et blessent inutilement. » Ce à quoi le polémiste réplique : « Mon cher Michel, est-ce que les républicains se sont enquis des blessures qu’ils causaient aux catholiques au début du 20ème siècle ? Non ! Je suis vraiment très surpris de votre part par ce sentimentalisme. » Quelques piques et désaccords plus tard sur « la République implacable », l’excellent et discret médiateur, pressé par le temps, oriente la discussion sur un autre sujet. Avec gourmandise, il déclare : « Alors messieurs, j’aimerais maintenant vous entendre sur l’échelon idéal pour exercer le pouvoir. » Leurs soutiens respectifs s’attendent à voir Eric en farouche défenseur du jacobinisme et de son Etat central unifié ; et Michel l’opiniâtre Girondin, ardent protecteur de la décentralisation du pouvoir. Là encore, ils surprennent leur auditoire par leur proximité. Chacun fait un pas l’un vers l’autre. L’intellectuel reconnait la nécessité d’octroyer un plus grand pouvoir aux maires. Le philosophe concède, lui, que la Vème République, pourvu qu’elle ait à sa tête un général de Gaulle et non un Emmanuel Macron, peut être une synthèse efficiente entre la nécessaire figure royale et l’expression populaire.

Au bout du compte, après les deux heures de débat, leurs désaccords se cristallisent sur seulement deux sujets parmi l’ensemble des thèmes abordés. La sortie de l’Union européenne défendue par Michel Onfray et à laquelle Eric Zemmour ne peut pas souscrire par tactique électorale. Plus symbolique en revanche est leur désaccord sur la menace principale qui plane sur la civilisation occidentale. Pour le philosophe, Elon Musk et son transhumanisme fou doit être notre première inquiétude, quand l’auteur du Suicide Français voit dans l’Islam la menace la plus directe. La discussion d’hier et les applaudissements de toute la salle, récoltés aussi bien par Michel Onfray que par Eric Zemmour, montre bien que la frontière entre souverainiste de gauche et souverainiste de droite est désormais réduite, à peau de chagrin

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