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Rodéos urbains: «Tant que la Justice ne jouera pas son rôle, les policiers seront condamnés à travailler pour rien»

FIGAROVOX/ENTRETIEN - Samedi 23 octobre, Bruno Lethuillier, maire de la commune du Faulq, dans le Calvados, a été frappé d'un coup de matraque, alors qu'il tentait d'arrêter un rodéo urbain. Pour Pierre-Marie Sève, la Justice n'accorde pas à la police les outils nécessaires pour enrayer ce type de pratiques.

Image d'illustration

Par : Entretien FigaroVox

Pierre-Marie Sève est délégué général de l'Institut pour la Justice (IPJ), une association de citoyens mobilisés au côté des victimes.

FIGAROVOX. - Dans le Calvados, un maire a reçu un coup de matraque en voulant arrêter un rodéo urbain qui se déroulait dans sa commune. Comment les forces de l'ordre peuvent-elles agir face à ce phénomène récurrent ?

Pierre-Marie SÈVE. - Une solution vient tout de suite à l'esprit mais elle doit être directement écartée. Cette solution est l'aggravation des sanctions pénales. Comme pour le trafic de drogue, les sanctions contenues dans le Code pénal aujourd'hui sont déjà suffisamment lourdes. Une loi avait ainsi été votée puis promulguée en procédure accélérée durant l'été 2018 car, déjà, ces rodéos posaient problème.

Cette loi aggravait les sanctions contre les auteurs de rodéos urbains et prévoyait jusqu'à 5 ans de prison en cas de rodéo motorisé sous l'emprise de stupéfiants. Malheureusement, cette loi n'a eu aucun effet pour enrayer le phénomène car ces sanctions ne sont que des plafonds. Ceux-ci ne sont jamais atteints car les magistrats sont encouragés, par les différentes lois pénales, à ne jamais prononcer de peines de prison. La loi de 2018 n'était donc qu'un effet de communication et toute autre loi aggravant les peines s'expose au même risque.

« Officiellement, la consigne est de rester à distance et de mener des enquêtes a posteriori pour éviter les situations difficiles pour les policiers. Ce travail d'enquête occupe du temps de travail des policiers et entraîne des délais répercutés dans la phase judiciaire. »

Pierre-Marie Sève

Actuellement, les forces de l'ordre n'interviennent que très peu en flagrant délit lors des rodéos urbains, car elles ont pour consigne de ne pas provoquer d'incident. Officiellement, la consigne est donc de rester à distance et de mener des enquêtes a posteriori pour éviter les attroupements et situations difficiles pour les policiers. Ce travail d'enquête occupe du temps de travail des policiers et entraîne des délais répercutés dans la phase judiciaire.

Ces difficultés, les délinquants les connaissent et en profitent. Ils roulent sans casque, multiplient les comportements dangereux au volant, le tout sans craindre la police, et surtout sans craindre la Justice. C'est le deuxième aspect fondamental du problème : lorsque les policiers remontent aux auteurs des rodéos urbains et les interpellent, ils sont très peu condamnés ou bien condamnés à des peines dérisoires.

Ensuite, la confiscation du véhicule devait être rendue beaucoup plus facile avec la loi de 2018. Mais encore une fois, elle pose des problèmes : puisque les policiers ne travaillent qu'à partir d'enquêtes a posteriori, il devient difficile d'identifier les auteurs, encore davantage d'identifier leurs véhicules. Et encore, quand c'est le cas, il s'agit souvent du véhicule d'un tiers, donc impossible à confisquer, etc.

Il me semble que la solution serait de cesser d'avoir des états d'âme pour les délinquants. En cette matière comme pour tous les délits, la fermeté doit être implacable et, à ce titre, les peines planchers doivent être rétablies et appliquées. Il faut que les délinquants sachent que l'État en face d'eux n'a pas d'état d'âme à les punir pour protéger le reste de la population, respectueuse des lois.

À Lyon, des policiers de la BAC ont été la cible de coups de feu alors qu'ils surveillaient un point de deal. Est-ce là un danger inhérent au travail des policiers aujourd'hui ?

On peut se le demander en effet, quelques mois après le décès d'Eric Masson, policier avignonnais.

Si l'on regarde froidement les chiffres, le nombre de policiers décédés en mission reste heureusement assez bas : les deux pics des dernières années étaient de 4 policiers morts en mission en 2009, et en 2014.

« Tant que les délinquants auront le sentiment d'une impunité, l'insécurité aura vocation à grandir. »

Pierre-Marie Sève

Sur l'année 2020, ce nombre monte à 7. Il est encore tôt pour y voir une tendance de fond, mais plusieurs éléments font effectivement penser à une hausse de la violence en France, et donc au premier chef, une hausse de la violence contre les policiers, en première ligne.

Le nombre de coups et blessures par exemple, qui a fortement augmenté depuis 3 ans, en est un indice clair. De manière générale, l'augmentation du trafic de drogue, l'augmentation de la délinquance et de la criminalité sont des symptômes d'une hausse générale des niveaux de violence dans la société française. Dans une société plus violente, la police doit faire face à des comportements plus violents, c'est grave mais inévitable.

Plus d'un mois après le Beauvau de la sécurité, quelles sont les solutions mises en avant pour faciliter le travail des forces de l'ordre ?

À mon grand étonnement, le Beauvau de la sécurité aurait satisfait les syndicats de policiers.

Le président de la République se serait engagé à augmenter le budget du ministère de l'intérieur, mesure à la mode depuis la frénésie inflationniste. Il a également annoncé la suppression prochaine du rappel à la loi. Cette suppression, qui peut sembler bienvenue et qui est symboliquement assez importante,est pourtant tout à fait inopérante si le nombre de places de prison n'est pas substantiellement augmenté. Il sera d'ailleurs remplacé par un mécanisme similaire et le travail des policiers n'en sera donc pas amélioré.

De manière générale, peu importent les solutions mises en avant pour faciliter le travail des forces de l'ordre, tant que la Justice ne jouera pas son rôle, les policiers sont condamnés à avoir le sentiment (bien réel) de ne travailler pour rien. Et tant que les délinquants auront le sentiment d'une impunité, l'insécurité aura vocation à grandir.


(SOURCE) : lefigaro.fr SOURCE / LIRE L'ARTICLE COMPLET

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