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Hommage à Samuel Paty : Qu’a changé la mort de Samuel Paty dans la manière d’enseigner des profs ?

Un an après la mort de l’enseignant, le traumatisme est toujours prégnant chez ses collègues

Image d'illustration

Par : Delphine Bancaud

L’ESSENTIEL

  1. Un an après l’assassinat de Samuel Paty, la France s’apprête à honorer la mémoire de l’enseignant en cette fin de semaine.
  2. Chez ses collègues profs, l’émotion est toujours immense. Le drame a renforcé la détermination de certains à aborder les questions liées à la laïcité et à la liberté d’expression dans leurs cours.
  3. Mais cette tragédie a aussi entraîné un phénomène d’autocensure chez certains, qui craignent pour leur sécurité.

Samedi, cela fera un an que l’impensable est arrivé. La décapitation de Samuel Paty, 47 ans, près de son collège de Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines) par Abdoullakh Anzorov, qui lui reprochait d’avoir montré des caricatures de Mahomet à ses élèves. Un assassinat qui avait suscité une émotion considérable chez les Français. Et chez les enseignants encore plus. « Ça a été un tel choc. Et beaucoup d’entre nous ne l’ont toujours pas surmonté », explique Christine Guimonnet, secrétaire générale de l’APHG, association des professeurs d’Histoire-Géographie.

Pour beaucoup d’enseignants, il y a un avant et un après. Depuis ce drame, certains mettent encore plus un point d’honneur à faire passer des messages sur la liberté d’expression, l’esprit critique et la laïcité à leurs élèves. A l’instar de Sandrine, professeure de SVT, qui a répondu à notre appel à témoins : « J’ai accentué auprès de mes élèves tout ce qui peut éduquer leur sens critique. Mais je suis plus inquiète quand je dois aborder les thèmes sur l’origine de l’être humain ou celle de la Terre. Je prends de longues minutes pour expliquer que je présente des idées scientifiques et que je ne critique pas, ce faisant, des convictions religieuses. Et lorsque j’aborde le sujet des caricatures, j’explique souvent leur origine, le travail de dénonciation des journalistes néerlandais, le travail de soutien des journalistes français. Car mes élèves ignorent tout du contexte dans lequel elles sont parues ».

« Ce drame a renforcé mes liens avec les élèves »

Gilles Roumieux, professeur d’Histoire-Géographie à Alès, a lui monté l’initiative « Touche pas à mon professeur » l’an dernier. « Il s’agissait pour les élèves d’écrire ce que signifiait pour eux vivre dans un pays en liberté, le rôle du professeur et ce qu’ils avaient compris de l’assassinat de Samuel Paty. Je ne me suis jamais autocensuré, même si on m’a menacé de mort sur Twitter. Ce drame a renforcé mes liens avec les élèves. Dans mes cours, j’essaye toujours de leur donner la parole, de les écouter vraiment. Et de leur montrer que seules les interactions permettent de s’élever. »

Mais depuis la mort de Samuel Paty, d’autres enseignants craignent davantage de subir la contestation d’un de leurs cours et que leur sécurité soit remise en cause. Comme en témoigne Maud : « Je m’autocensure davantage en craignant l’enchaînement mortel qui a causé la mort de Samuel Paty. J’ai choisi une autre approche, moins frontale et moins centrée sur la France, pour aborder la liberté d’expression, en parlant par exemple des journalistes de langue arabe assassinés ; notamment Said Mekbel et Naji al-Ali ». Romain, enseignant en Lettres-Histoire en lycée professionnel, a aussi l’impression de davantage marcher sur des œufs : « Je fais très attention à ne pas heurter les différentes religions dans mes cours depuis toujours, mais aujourd’hui, j’ai peur de parler de certains sujets. Non pas peur des élèves, mais de leurs familles. En effet, comme l’a montré l’affaire Paty, la hiérarchie se désolidarise de nous tant que les affaires ne sont pas médiatisées, on cherche la responsabilité des enseignants dès qu’il y a un incident. On nous laisse seul face aux familles parfois violentes. Nous n’avons pas de protection, les établissements scolaires ne sont pas sécurisés »

La peur d’être la cible d’élèves ou de parents d’élèves

Marc, professeur de Sciences de la vie et de la Terre, ne se sent pas non plus protégé : « Si un élève fait l’apologie du terrorisme dans votre classe à l’occasion d’une minute de silence, par exemple, vous ne serez soutenu par aucun collègue, aucun membre de la hiérarchie. Je l’ai vécu. On vous fera bien comprendre que vous avez dû mal interpréter ses propos. » Un sentiment partagé par Marjorie, prof de Français au collège : « On n’a jamais eu de formation pour nous expliquer comment gérer ce genre d’emballement. Alors si en quelques jours, un harcèlement du même acabit que celui qu’a subi Samuel Paty éclate et que j’en suis la victime, je ne sais pas comment réagir. »

De son côté, le ministère fait valoir les mesures supplémentaires qui ont été prises pour sécuriser le quotidien des profs. L’article 10 de la loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République a ainsi consacré un amendement dit « Samuel Paty », qui punit de trois ans d’emprisonnement et 45.000 euros d’amende « le fait d’entraver, d’une manière concertée et à l’aide de menaces, l’exercice de la fonction d’enseignant ». La loi a également créé un nouveau délit de mise en danger de la vie d’autrui par la diffusion, dans un but malveillant, d’informations relatives à la vie privée.

Une équipe nationale laïcité en soutien des académies

Selon les derniers chiffres de l’Education nationale, entre les mois de décembre 2020 et mars 2021, 547 signalements d’atteinte au principe de laïcité ont été recensés. Un nombre en baisse par rapport à l’an dernier, où 935 cas d’atteinte à la laïcité ont été constatés à l’école. « Il me semble que les parents ont mieux compris que les tentatives d’intrusion dans la pédagogie des enseignants n’étaient plus possibles et que cela pouvait avoir des conséquences graves pour les enseignants », note Bruno Bobkiewicz, secrétaire général du syndicat national des personnels de direction de l’Éducation nationale. Selon lui « l’intérêt des chefs d’établissement n’est pas de mettre sous le tapis les incidents, mais bien de les traiter pour qu’ils ne se reproduisent pas. » Christine Guimonnet se veut elle aussi plus optimiste : « Je pense qu’il y a eu une prise de conscience sur le fait qu’un établissement n’était pas le lieu où l’on pouvait pratiquer sa religion. Et que tout enseignant pris à partie par un élève ou un parent doit être systématiquement soutenu par son administration et que ses collègues devaient faire corps autour de lui. »

Le ministère rappelle aussi l’existence d’une équipe nationale laïcité qui vient en soutien des académies. « En fonction des remontées académiques pluriquotidiennes vers la cellule de veille du ministère, dès que des menaces qui peuvent être considérées comme sérieuses sont identifiées, des dispositifs de surveillance sont mis en œuvre, le cas échéant en lien avec les services de police ». Par ailleurs, un vade-mecum laïcité apporte aux équipes éducatives des réponses juridiques précises et donne des conseils d’action et une adresse de saisine permet à chaque personnel de l’Education nationale de contacter l’équipe nationale laïcité, qui s’engage à le joindre sous 24 heures. « Les référents laïcité dans les rectorats sont encore plus vigilants qu’avant et les chefs d’établissements savent davantage qu’ils peuvent les solliciter », souligne Bruno Bobkiewicz.

Enfin, depuis la rentrée, la formation de 1.000 formateurs à la laïcité et aux valeurs de la République a démarré. Charge ensuite à eux de faire profiter de leur expertise aux personnels de chaque école, collège ou lycée.


(SOURCE) : 20minutes.fr LIRE L'ARTICLE COMPLET



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